Citizen Four, Réalité, Birdman / Revue de films
Publié le 8 Mars 2015
Citizen Four de Laura Poitras
"En 2013, Edward Snowden déclenche l’un des plus grands séismes politiques aux Etats-Unis en révélant des documents secret-défense de la NSA. Sous le nom le code "Citizen four", il contacte la documentariste américaine Laura Poitras. Elle part le rejoindre à Hong Kong et réalise en temps réel
, un document historique unique et un portrait intime d’Edward Snowden."
D'emblée je vous le dis, Citizen four est un documentaire exceptionnel et d'une grande maitrise. C'est vertigineux de penser qu'il a été réalisé au moment même où les faits se déroulaient. Edward Snowden était filmé pendant qu'il rencontrait les journalistes du Guardian et du Washington Post pour leur donner les documents en sa possession. Après avoir vécu cette actualité à travers la presse en juin 2013, nous avons accès à tout ce qui s'est passé en coulisses en images. Je trouve ça exceptionnel. C'est l'Histoire qui se déroule sous nos yeux.
C'est d'ailleurs très intéressant de voir la façon dont s'est passée la collaboration entre la presse et Snowden. Avec un respect mutuel qui crève l'écran. Chacun des protagonistes sait qu'il court un risque et ils sont solidaires de toutes leurs actions qui sont réfléchies et ordonnées.
On découvre un jeune homme calme et posé qui s'apprête à déclencher un séisme. Edward Snowden est d'une maturité incroyable. Il a longuement cogité et réfléchi aux conséquences de son acte totalement désintéressé. C'est un idéaliste humaniste qui croit fermement que dénoncer les actes de surveillance de la NSA est un service à rendre aux gens. Il sait que sa vie va être bouleversée, qu'il ne verra plus sa famille, qu'il risque la prison voire la mort et pourtant il est déterminé et motivé parce qu'il croit à ce qu'il fait. Sa seule motivation est de dire la vérité et de la faire savoir. C'est une incroyable leçon d'héroïsme d'un super héros dont le seul pouvoir et de dire la vérité.
Edward Snowden est touchant dans sa démarche et convaincant dans ses idées. Il m'a touchée et il m'a convaincue. Quel courage pour défendre son idéal, j'en avais les larmes aux yeux. Quand on le revoit à la fin du documentaire, en Russie où il est réfugié (quelle ironie, les deux pays qui lui ont accordé le refuge sont la Chine et la Russie...) à peine un an après les faits, il a pris 10 ans, son visage est transformé par l'angoisse j'imagine... on sent qu'il ne doit pas bien dormir la nuit... J'ai été touchée aussi par tous ces gens qui défendent Snowden, ces ambassadeurs de paix et défenseurs des droits de l'homme, ces avocats qui n'ont rien à gagner, ces journalistes qui se sont mouillés...
après avoir vu Citizen four.
Citizen four en dehors de montrer des faits, interpelle et fait énormément réflechir. La notion de liberté individuelle rejoint celle de vie privée. Comme le dit un des intervenants à la fin du film, aujourd'hui on parle de vie privée alors qu'avant on parlait de liberté. Comme si la liberté était déjà tellement menacée qu'il ne nous reste plus que que notre vie privée à protéger. Et cette phrase aussi tellement ancrée dans l'actualité récente de notre pays : "A quoi sert la liberté d'expression si elle ne peut être protégée ?"...
Un film d'une force exceptionnelle, un documentaire filmé comme un polar ou un film d'espionnage, qui prend aux tripes, qui remue, qui fait réflechir... Un polar sans aucune fiction...
Réalité de Quentin Dupieux
"Jason Tantra, un cameraman placide, rêve de réaliser son premier film d'horreur. Bob Marshall, un riche producteur, accepte de financer son film à une seule condition : Jason a 48 heures pour trouver le meilleur gémissement de l'histoire du cinéma…"
Depuis quelques années maintenant c'est devenu un rituel. J'attends mon Quentin Dupieux annuel (Woody Allen sort de ce corps !). Les films ne se valent pas tous mais que je sois très enthousiaste ou moins je sais que je vais retrouver un univers et des personnages singuliers qui vont me plaire. Quentin Dupieux a imposé un genre et une signature qui lui appartiennent et dont on reconnait la patte dès la première scène. Ici une émission de télé réalité culinaire qui semble sortie d'une autre dimension. On peut y voir d'ailleurs tout au long du film, un message sur la télé qui rend stupide, la télé qui abrutit les masses...
L'absurde est toujours au rendez-vous évidemment et tout n'est pas forcément à comprendre et à expliquer. Une petite fille trouve une K7 Vidéo intacte dans les entrailles d'un sanglier, tout le monde explique qu'un sanglier ne peut avaler une K7 et personne n'y croit, pourtant c'est la réalité ! A moins que... Mais dans quelle réalité est-on ? C'est la question que l'on se pose durant tout le film qui réserve de nombreuses suprises dont le surréalisme de certaines est délicieux.
Les personnages sont drôles, originaux, cinglés, odieux et Alain Chabat nous campe un chouette caméraman dont la réalité va basculer dans la réalité de quelqu'un d'autre à moins que ce ne soit la sienne, ou alors...
Il n'y a pas de comparaison formelle à faire mais sa recherche du gémissement absolu fait penser à celle de Travolta qui cherche le meilleur cri d'horreur dans Blow Out. Comme je suis fan absolue de ce fin de Brian de Palma, j'ai eu envie d'y voir un hommage...
Le casting est toujours soigné dans un film de Quentin Dupieux et les belles surprises toujours au rendez-vous entre acteurs connus ou têtes connues voire déjà vu dans les films précédents et qu'on retrouve avec joie comme Eric Wareheim qui me fait tellement rire.
Un film absurde, drôle, fou et surréaliste sur le cinéma, le rêve, la réalité... Un puzzle qui prend forme petit à petit tout en déroutant mais si on entre dans le délire, il y a du génie... à moins que ce ne soit de la folie !
Birdman de Alejandro González Iñárritu
"À l’époque où il incarnait un célèbre super-héros, Riggan Thomson était mondialement connu. Mais de cette célébrité il ne reste plus grand-chose, et il tente aujourd’hui de monter une pièce de théâtre à Broadway dans l’espoir de renouer avec sa gloire perdue. Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego…
S’il s’en sort, le rideau a une chance de s’ouvrir.."
C'est toujours étrange de ne pas se sentir en communion avec une majorité qui a l'air de détenir une vérité critique et culturelle. Pourquoi je ne me suis pas sentie en phase avec toux ceux qui affirment que Birdman est un chef d'oeuvre, une oeuvre magistrale, éblouissante, majeure... ?
Je ne sais pas mais ce que je sais c'est que je me suis ennuyée parce que je n'ai pas accroché plus que ça à l'histoire. Oui c'est super bien filmé, oui les acteurs sont tous exceptionnels, oui Michael Keaton est incroyable, oui l'ambiance de Broadway et du théâtre sont recréées à merveille. Oui la forme du film est intéressante mais le fond m'a profondément ennuyé. Une histoire vue et revue, des questionnements qui n'intéressent plus tellement ils ont été traités au cinéma et mieux en plus (Opening Night de Cassavetes reste dans mon coeur). Je n'ai pas aimé la façon dont le sujet est traité avec cette voix assez désagréable qui parle au héros ni les ellipses hors du réel... Pourtant j'aime quand la poésie et l'inattendu vient dans une histoire classique mais là ça n'a pas pris avec moi.
J'ai d'abord cru que c'était moi, que je devais avoir vu le film trop fatiguée puis j'ai discuté avec d'autres personnes, cinéphiles ou non et au final, beaucoup sont de mon avis où se sont carrément fait chier devant le film. Birdman est donc un film qui divise et qui fait parler, c'est déjà ça !