Certaines femmes, 20TH Century Women, Rockn'Roll, Split / Revue de films
Publié le 6 Mars 2017
Certaines femmes de Kelly Reichardt
"Quatre femmes font face aux circonstances et aux challenges de leurs vies respectives dans une petite ville du Montana, chacune s’efforçant à sa façon de s’accomplir. "
Un portrait touchant et en finesse de quatre femmes que l'on retrouve dans une petite ville du Montana. Un film écrit à la manière d'un roman, comme des nouvelles plutôt qu'un film à sketches.
Ces femmes ont en commun beaucoup de choses mais surtout la solitude, celle qui est profonde et avec laquelle on vit en continuant d'avancer. La solitude amoureuse, familiale, professionnelle, amicale... Elles subissent sans se plaindre malgré une frustration évidente. Ce qu'elles subissent sont juste des tracas quotidiens, des petites remarques désobligeantes, un peu de sexisme, un peu d'indifférence mais finalement elles ressemblent à tellement d'autres femmes, elles me ressemblent aussi... Des femmes invisibles comme partout ailleurs...
Les quatre interprètes, Laura Dern, Michelle Williams, Kirsten Stewart et Lily Gladstone, sont toutes magnifiques de justesse.
C'est un film au rythme lent, qui déroute parfois, qui se déroule dans un environnement naturel un peu hostile mais il se passe quelque chose au fur et à mesure... Certaines femmes est un film qui pénètre en toi petit à petit et dont la force s'intensifie après la vision...
Pourquoi j'y suis allée : pour le casting et par curiosité
20TH Century Women de Mike Mills
"Santa Barbara, été 1979. L’époque est marquée par la contestation et d’importants changements culturels. Dorothea Fields, la cinquantaine, élève seule son fils Jamie. Elle décide de faire appel à deux jeunes femmes pour que le garçon, aujourd’hui adolescent, s’ouvre à d’autres regards sur le monde : Abbie, artiste punk à l’esprit frondeur qui habite chez Dorothea, et sa voisine Julie, 17 ans, aussi futée qu’insoumise… "
Jamie, 15 ans, se souvient de son adolescence. Il est élevé par une mère célibataire qui s'entoure de locataires pour avoir l'illusion de ne pas vivre seule (Dalida, sort de ce corps !).
Jamie est un ado entouré de femmes, il n'a pas d'affinités avec William, le seul homme de la maison et autre locataire de sa mère. Elle veut faire de son fils un homme bien et demande à Abby, sa locataire artiste en rémission d'un cancer et à Julie, la meilleure amie de son fils dont il est amoureux, de lui donner des conseils.
Les trois femmes vont chacune à leur manière, tenter de donner à Jamie, des conseils pour aimer les femmes et la vie en général.
C'est un film qui décrit une époque. Celle des années 70/80, le punk, l'Amérique pré-Reagan qui se cherche, le féminisme. Une époque qui préfigure les grands bouleversements à venir qu'ils soient idéologiques ou technologiques.
Jamie expérimente, sort, écoute de la musique, apprend à suivre ses envies comme tous les ados de son âge. Il s'intéresse de près aux théories féministes et en vient à s'interroger sur sa mère et sa condition de femme "obsolète". Cet état que beaucoup de cinquantenaires seules peuvent ressentir en s'oubliant pour se consacrer aux enfants...
Le film interroge aussi sur la relation parent-enfant. Un parent ne connait jamais vraiment son enfant comme les autres le voient. C'est un deuil de parent douloureux à faire... Dorothea veut faire un homme de son fils mais quand ça devient trop concret elle trouve que ça va trop vite !
Un joli film très dense pour tous les sujets qu'il aborde et toutes les questions qu'il soulève. Parfois à peine esquissées comme la scène du discours de Carter sur "la crise de confiance" et le consumérisme, sujets si contemporains. Un peu d'humour aussi et beaucoup de tendresse...
Pourquoi j'y suis allée : parce que j'avais lu une interview du réalisateur et ça m'a donné envie
Split de M. Night Shyamalan
Le film attire l'attention sur le phénomène de personnalités multiples. Chaque identité a sa propre vie, sa voix, son physique, ses maladies... Ces personnes souffrant de ce mal utilisent-ils mieux toutes les capacités de leur cerveau ? La réflexion est intéressante, comme en cours magistral à la fac. On apprend et on s'en doute, les personnalités multiples se créent pour résister et survivre à des situations d'abus. C'est le cas de Kevin, dont les flash-backs vont nous orienter sur sa condition. On se crée tous des personnalités différentes pour survivre ou tout simplement se sortir d'une situation compliquée mais on ne souffre pas pour autant de TDI (Troubles Dissociatifs de l'Identité).
Kevin kidnappe donc trois jeunes filles pour les offrir, à qui ? on le saura plus tard. Très vite on voit apparaître quatre de ses identités. C'est sur ça que va reposer l'espoir des filles, surtout celui de Casey qui comprend vite le processus.
Tout de suite on sent que Casey est différente, plus forte mais aussi qu'elle a une sensibilité exacerbée et qu'elle doit avoir un sacré vécu traumatisant. Les flashbacks de son enfance nous préparent au drame attendu.
Rockn' Roll de Guillaume Canet
"Guillaume Canet, 43 ans, est épanoui dans sa vie, il a tout pour être heureux.. Sur un tournage, une jolie comédienne de 20 ans va le stopper net dans son élan, en lui apprenant qu’il n’est pas très « Rock », qu’il ne l’a d’ailleurs jamais vraiment été, et pour l’achever, qu’il a beaucoup chuté dans la «liste» des acteurs qu’on aimerait bien se taper… Sa vie de famille avec Marion, son fils, sa maison de campagne, ses chevaux, lui donnent une image ringarde et plus vraiment sexy… Guillaume a compris qu’il y a urgence à tout changer. Et il va aller loin, très loin, sous le regard médusé et impuissant de son entourage."
Guillaume Canet joue Guillaume Canet, l'acteur, le mari, le père, l'ami. C'est un homme comme les autres qui rentre chez lui le soir pour raconter des histoires à son fils. On a l'impression de le voir au naturel, mais peut être ce n'est que l'acteur qui joue à l'acteur...
Suite aux remarques désagréables de sa partenaire de tournage, il va redoubler d'efforts pour paraître plus jeune mais tout tombe à côté de la plaque. Il se met aussi à fantasmer sa vie et se persuade qu'il est dans le vrai. Il va tout tester jusqu'au bout, soirées, alcool, drogue... Pendant ce temps Marion, accaparée par la préparation de son rôle pour Xavier Dolan, n'est pas trop à l'écoute et ne mesure pas l'ampleur du mal être qui ronge Guillaume. On assiste à des scènes surréalistes où Marion Cotillard est désopilante avec son accent québécois. Quand à Guillaume, après une soirée arrosée d'anthologie, il nous invite à une fête d'anniversaire d'enfant mémorable.
On pourrait penser qu'il va revenir à la réalité après un pétage de plombs salutaire, au contraire, il devient pathétique à vouloir absolument être quelqu'un qu'il n'est pas. Il se grille auprès de la profession avec brio et entame une transformation incompréhensible aux yeux de tous.
Guillaume Canet traite la crise de la quarantaine avec humour et autodérision mais aussi de la descente aux enfers d'un comédien, d'un homme qui ne veut pas vieillir ou qui ne veut pas voir son image vieillir. Il montre aussi les affres de la vie d'actrice, le temps qui passe c'est dur pour les acteurs qui jouent avec leur image sans arrêt. On rigole beaucoup mais ça ne devient plus drôle du tout. On est mal à l'aise pour le comédien, pourtant lui semble revivre.
Je n'ai pas trop aimé la fin qui nous entraîne ailleurs que ce à quoi j'avais pensé. Il y a du constat mais pas de prise de conscience. J'ai été déstabilisée par ce choix en fait alors que je vois bien l'originalité et ce chemin à contre-courant. Pour ne pas spoiler, je ne peux en dire plus... Il y a beaucoup de métaphores sur notre société de l'image et du paraître, sur la façon dont on nous voit, la façon dont on se voit...
J'ai beaucoup aimé et une comédie beaucoup plus profonde qu'il n'y paraît...
Pourquoi j'y suis allée : pour Marion Cotillard et Guillaume Canet