Django Unchained, Wadjda, Tu honoreras ta mère et ta mère / Revue de films
Publié le 19 Février 2013
Django Unchained de Quentin Tarantino
Synopsis. "En 1858, dans le Sud des États-Unis, quelque temps avant la guerre de Sécession, un ancien dentiste allemand reconverti en chasseur de primes, le Dr King Schultz libère Django, un esclave. Il le forme afin qu'il puisse l'assister dans une mission, puis pour le remercier décide de l'aider à libérer sa femme des mains de Calvin Candie, un riche et impitoyable propriétaire terrien du Mississippi."
Interdit aux moins de 12 ans
J'adore cette sensation de sentir dès le générique de début que je suis dans un film de Tarantino. La caméra, l'image, la musique.
Des films qui traitent vraiment de l'esclavage et de ses horreurs il y en a peu, étonnant d'ailleurs qu'une si importante partie de l'histoire américaine soit autant ignorée du cinéma (honte ? difficulté de revenir sur ce passé peu glorieux ?). On a eu Amistad de Steven Spielberg, excellent film avec un traitement relativement classique.
Et maintenant il y a la marque de Quentin Tarantino qui a réussi l'exploit de faire un western avec l'esclavage en toile de fond. Les cow-boys sont bien là et les indiens ont la peau encore plus foncée.
Evidemment c'est dur, même aujourd'hui on a du mal à croire que cette injustice et cette aberration ait eue lieu avec la bénédiction d'une grande partie de la population. Tarantino a toujours eu sa façon de montrer et de filmer la violence, quand c'est dans Kill Bill ça ne me fait pas grand chose mais là j'ai eu du mal et j'ai dû garder les yeux fermés durant deux scènes insupportables.
Hormis cette violence trop forte pour la petite nature que je suis, le film est remarquable dans sa façon de montrer les rapports tendancieux qui liaient les maîtres et les esclaves. Ces relations sado-masochistes où l'on sent parfois une pointe d'affection ou de respect, liées à la survie où à l'asservissement. Ces relations d'esclave à esclave aussi, cette hiérarchie qui s'installe entre les noirs eux-mêmes.
Le film est aussi une belle et tendre histoire d'amour, l'amour pur et durable qui naît au coeur de la tourmente et de l'horreur, l'amour qu'on ne peut enlever aux deux êtres à qui on a tout pris. Cet amour qui peut soulever des montagnes, celui qui maintient en vie quoi qu'il arrive.
Django Unchained est un festival d'excellents comédiens et j'étais tellement dedans que je n'ai pas reconnu Samuel L. Jackson, exceptionnel dans le rôle de ce vieil esclave pire que ses maîtres. J'ai eu un flash trois jours après, c'est pour dire. A ma décharge, je n'avais rien lu sur le film, rien vu, même pas une bande annonce, j'y suis allée quasi vierge de toute info.
Un grand film de Tarantino pour moi, sans aucun doute et tellement jouissif sur la dernière partie, l'explosion d'une justice sans états d'âme pas forcément politiquement correcte mais tellement bonne pour le moral ! Cela se voit que j'ai adoré n'est ce pas ?!
Wadjda de Haifaa al-Mansour
"Synopsis. Wadjda, douze ans, habite dans une banlieue de Riyad, capitale de l'Arabie Saoudite. Bien qu'elle grandisse dans un milieu conservateur, c'est une fille pleine de vie qui porte jeans et baskets, écoute du rock et ne rêve que d'une chose : s'acheter le beau vélo vert qui lui permettra de faire la course avec son ami Abdallah. Mais au royaume wahhabite, les bicyclettes sont réservées aux hommes car elles constituent une menace pour la vertu des jeunes filles... Wadjda va pourtant tout faire pour avoir son vélo..."
Avant même de voir le film, on en parlait beaucoup parce que c'est le premier film tourné en Arabie Saoudite et par une femme de surcroît, la seule réalisatrice du pays. Les cinémas sont illégaux dans ce pays, ça fait envie.
Wadjda est un film essentiel parce que d'une part c'est un excellent film, tout en finesse sur un sujet délicat et d'autre part c'est aussi une oeuvre documentaire sur la façon dont ça se passe pour les femmes dans ce pays.
Je ne suis jamais allée en Arabie Saoudite et d'ailleurs je ne connais pas grand chose de ce pays à part les "on dit"... Pourtant je ne m'en faisais pas une image aussi radicale que celle que montre le film. J'imaginais ce pays plus moderne que d'autres, mais non les femmes sont invisibles et n'ont pas voix au chapitre, les hommes sont polygames quand ça les arrange. Les rues sont désertes, les gens et surtout les femmes vivent à l'intérieur ou sont voilées des pieds à la tête quand elles doivent sortir. Un ami qui revient d'Oman a trouvé que le film était totalement conforme à la réalité de la région et un pays où les femmes n'existent pas, ça l'a marqué lui aussi.
Mais attention, aucune violence dans le film. C'est mon côté femme occidentale libre qui s'offusque et qui est choqué. La réalisatrice montre ce quotidien sans juger, sans révolte. Elle y montre par contre la tristesse d'une femme trompée, la tristesse d'une enfant fille qui sait qu'elle compte moins qu'un garçon aux yeux de son père. Elle y montre une certaine fatalité à accepter son sort tout en tentant d'être heureux malgré tout. Et cette religion qui est tout le temps là, ces non-dits, cette hypocrisie...
Le film dépeint, à travers l'histoire de Wadjda qui rêve d'un vélo, le quotidien des femmes et des filles. C'est marrant ce contraste intérieur/extérieur. Leur seule liberté, c'est entre les quatre murs de leur appartement qu'elles la trouvent, c'est enfermées qu'elles sont libres. Libres de s'habiller comme elles le souhaitent, libres d'écouter de la musique en anglais, libres de chanter, libres de rêver...
Wadjda incarne l'espoir, pas étonnant qu'elle rêve de ce vélo, symbole de liberté lui aussi. Son amitié avec un jeune garçon de son âge est pourtant entâchée par les histoires de mariage arrangés mais on a envie d'y croire qu'ils pourront se marier par amour s'ils le souhaitent. On a envie de croire que ce jeune garçon qui aide Wadjda à faire du vélo sera d'une génération nouvelle qui accordera plus de libertés aux femmes. On a envie de croire que toutes ces jeunes filles réussiront à se faire entendre, à faire entendre une autre voix dans le pays. Certaines tentent déjà par tous les moyens de vivre seon leurs désirs, souvent à leurs dépens mais elles essaient... Le film se termine sur une toute petite note d'espoir et j'ai envie d'y croire...
Un très beau film, remarquablement joué par tous les acteurs, des adultes aux enfants.
Tu honoreras ta mère et ta mère de Brigitte Roüan
Entre chamailleries, coups du sang et du sort, cet été là ne ressemblera à aucun autre."
J'adore le titre détourné d'un célèbre commandement sans compter que ça me fait penser à l'époque des blagues "ta mère en tongs" où les barres de rire étaient quotidiennes.
Dès le début j'ai rigolé même si je conçois que la blague de la subvention de CulturesFrance (Institut Français aujourd'hui) peut être encore plus drôle quand on connait les coulisses du milieu culturel.
Cette immense tribu qui se réunit pour les vacances sous le soleil grec est à mon sens vraiment représentative des questionnements qui agitent les familles. Brigitte Roüan a un vrai talent d'observation de ses contemporains.
Cela faisait longtemps que je n'avais pas autant ri avec une comédie française, un rire qui vient d'un film où c'est un peu le bazar dans le bon sens du terme, comme j'aime.
Les rapports des ados avec leurs parents, ah mais c'est tellement ça quand ils passent en deux minutes du "je t'aime" à "j'te déteste" ou encore la jalousie entre un petit garçon et son bébé de frère qui donne lieu à une scène hilarante proche de la réalité. Les questionnements des mères d'ado qui grandissent, comment accpeter leur émancipation encore un sujet dans lequel beaucoup de parents vont de reconnaître. Les rapports entre les enfants d'une fratrie, l'ainé, le cadet, ceux du milieu qui peinent à trouver leur place, quelle place on leur donne...
Bien entendu, les rapports de la "reine-mère" avec ses quatre fils sous-tendent tout le récit. Nicole Garcia a un mal fou à lâcher prise alors même que ses enfants sont eux-même parents. On assiste à un festival de mère juive, mère poule, mère castratrice mais mère aimante désemparée qui dit "Je peux t'aider quand même, je suis ta mère"... Phrase qui résonne en moi parce que ma fille n'a que 7 ans et pourtant je le dis déjà... J'ai bien aimé l'ambivalence de ces "grands garçons" qui trouvent leur mère étouffante mais qui ne peuvent s'empêcher de laisser le cordon en place qu'il soit matériel ou affectif.
Peut on vraiment un jour finir son job de mère ? Je ne sais pas si le film répond à la question et je ne sais pas si on peut y répondre d'ailleurs ! (ou si on a envie de connaître la réponse...)
Un film très agréable au casting sympathique, une bonne comédie et une très belle réflexion sur la maternité dans son ensemble.