Scènes de violence ordinaire sur des enfants
Publié le 7 Janvier 2014
Max Ernst, La Vierge Marie donnant une fessée à l'Enfant Jésus
On s'étonne que certains veulent mettre des lois sur la fessée et les châtiments corporels, veulent encadrer ce que des parents ont toujours considéré comme acquis. Je n'étais pas forcément pour la loi mais chaque jour qui passe me fait me poser des questions. C'est bien le problème, quand on est témoin de violence sur un enfant de la part de ses parents dans la vie quotidienne, on se trouve démuni. Démuni parce qu'on a peur d'intervenir et que le résultat soit à l'inverse de nos espérances, en général l'enfant prend double. Démuni parce que le "de quoi je me mêle ?" "pour qui elle se prend celle-là ?" n'est pas faux et que quand on attaque le parent il n'est pas rare que l'enfant prenne sa défense. Qui suis-je pour intervenir dans le métro, dans la rue, au parc, au cinéma... ?
On m'a dit "fais gaffe un jour tu vas t'en prendre une...", mais c'est plus fort que moi je n'arrive pas toujours à me contrôler et même si je ne fais rien, je ne peux m'empêcher de dire un truc fort en partant pour être sûr que l'enfoiré de parent m'a entendu.
Je ravale ma souffrance souvent et quand ça arrive devant Nina, on part dans de longues discussions. Elle-même me fait remarquer quand un parent "exagère".
Je ne parle pas là de la violence aggravée qu'on peut dénoncer (mais quand bien même, combien osent appeler les services sociaux ? ) ou faire punir par la justice mais bien de la violence ordinaire insidieuse et banalisée.
Et des scènes de violence ordinaire on en voit beaucoup trop souvent. Ces parents qui giflaient leur fils dans le métro, j'ai hurlé. Ils étaient hilares et ne parlaient pas français. Ce gamin est fichu je le sais, la seule communication qu'il a avec ses parents est tordue, limite il cherchait les coups avec sa façon de réagir, sachant qu'ils allaient arriver...
Cette mère hystérique à la sortie du cirque Phénix parce que sa petite fille de 7/8 ans marchait un peu sur la route. Je vous assure que ce n'était pas évident, des voitures et des gens partout, la gamine n'a rien fait exprès et même si... Sa mère l'attrape, la frappe sur la tête en lui tirant les cheveux tout en hurlant "ferme ton manteau". J'étais avec Nina...
Ce père qui dans le train n'arrête pas dire à son fils de 3 ans ! attaché dans sa poussette "Tu veux une fessée ? "Si tu bouges encore, tu auras une fessée..." et il a dit le mot fessée, une dizaine de fois durant tout le trajet. La mère ne disait rien, les parents continuaient à discuter et rigoler entre eux pendant que le gosse devait rester bien tranquille dans sa poussette...
Un enfant ne doit pas grandir avec la peur d'être frappé ni avec l'idée que c'est normal, que la violence est la réponse des adultes à un comportement qu'ils n'attendent pas. Et ce qui est grave c'est que ce comportement n'est pas toujours la désobéissance ou les bêtises, parfois c'est juste pour rien, juste comme ça, parce que ça défoule...
Oui voir un enfant se faire gifler ou se prendre une fessée ça me choque, ça me fait mal, ça me fait bondir, ça me donne des envie de faire pareil à l'adulte tout puissant qui s'attaque à un enfant, à son enfant.
Et puis quoi, un adulte n'a pas le droit de frapper un autre adulte mais il peut frapper son enfant en toute impunité ? C'est ça qu'on veut donner comme valeurs aux enfants ? Au nom de quoi, au nom de qui ?
Tous ces parents qui se croient bien élevés, bien propres sur eux, qui veulent reproduire un schéma familial qui leur a si bien réussi soi-disant, qui pensent qu'une fessée ou une gifle n'a jamais fait de mal à personne, tous ces parents qui utilisent la violence comme mode d'éducation... Tous ces parents qui se sentent dans leur bon droit et qui disent "c'est mon enfant, je fais ce que je veux..."
Et je me répète, je parle juste de cette violence ordinaire qui n'est pas considérée comme "grave". De cette violence ordinaire qui est considérée comme "normale" par beaucoup de parents, beaucoup trop de parents... Et malheureusement elle peut aussi être le fait d'un autre membre de la famille, un beau-parent, d'une nounou, d'un baby sitter, d'un prof, d'un ami de la famille...
Alors si les lois peuvent aider à faire changer les mentalités, je dis qu'elles sont bonnes à prendre. Si elles peuvent faire peur et empêcher les coups et bien elles sont bonnes à prendre. Evidemment, je ne vis pas au pays des Bisounours et je sais que contre la violence psychologique ou verbale, les moyens d'actions sont encore plus limités. Le parent qui répète sans arrêt à son enfant "tu es bête" ou "mais tu es débile ou quoi ?" fait probablement autant de mal que celui qui donne les coups. Combien de fois je les entends ces phrases dans le métro ou dans la rue...
La loi va t'elle arriver un jour en France et de quelle manière ? Je vous invite à lire cet article paru dans Le Monde du 17 octobre dernier. Peut être devra t'on se conformer à la législation européenne. Je suis évidemment d'accord avec tous les discours des "anti coups".
Une loi ne suffira pas, il faudra du temps pour changer les mentalités et puis c'est bien connu les Français ont horreur du changement et n'aiment pas les remises en question, la partie ne va pas être simple mais elle en vaut largement la peine.
Ps : et je ne peux m'empêcher d'ajouter que tous les adultes ne sont pas faits pour être parents...
Ps 2 : je ne m'érige pas en "bien pensante" ou quoi que ce soit, j'ai vévu 10 ans de mon enfance en étant le témoin de violences ordinaires sur des enfants et je sais de quoi je parle...
Ps 3 : je ne dis pas qu'un acte isolé sous le coup de l'énervement est dramatique, si ensuite le parent s'explique avec l'enfant et ne récidive pas bien entendu...
Ps 4 : à en croire les chiffres, je fait partie d'une minorité de parents à penser comme ça, j'ai mal à mon pays...
Ps 5 : Le numéro pour alerter en cas de maltraitance c'est le 119...